Manifeste 2013

Studio Canaldanse

Aurélie Galibourg / Matthieu Gaudeau
LA DIVISION DES SENS
EB. Je ne crois pas que ce soit bon de diviser comme ça les sens. Quand tu tournoies sur mon épaule, tu ne fermes pas les yeux, tu ne deviens pas sourde : tu as besoin de ces sensations visuelles et auditives autant que les autres. C’est sans doute vrai que tu utilises ta vision d’une manière que tu n’utilises pas habituellement, pareil pour l’audio. Mais tu les utilises tout autant (sinon tu pourrais tranquillement fermer les yeux, et ça tu ne le fais pas). Je crois plutôt qu’il faut parler en termes de perceptions d’objet ou de sphères, et du coup, il devient possible d’élargir ou rétrécir ces sphères, selon le désir compositionnel qu’on peut avoir.
MG. En Alexander, la division des sens a des effets catastrophiques sur la compréhension de la direction « vers le haut et vers l’avant », parce qu’évidemment, si on vous dit : placez la tête vers le haut, la première chose que vous faites c’est que vous tirez sur votre cou comme des malades, c’est-à-dire que vous modifiez votre somatotopie en modifiant vos sensations musculaires, parce qu’on vous a appris, socialement, culturellement, que sentir son corps, c’est activer ses muscles, c’est faire quelque chose avec. Tout l’apprentissage consiste à découvrir le caractère multi-modal de la somatotopie, c’est-à-dire à admettre qu’être « en haut » c’est autant une question audio, visuelle, tactile, etc. que musculaire.
Projet Bourbaki 13 mars 2013